TRAITE
DE LA VRAIE DEVOTION A LA SAINTE VIERGE – 2
LES
FAUSSES DEVOTIONS A LA SAINTE VIERGE - 1
C’est Saint Louis-Marie Grignon de Monfort, l’apôtre de la Sainte Vierge qui nous l’enseigne. Aussi, est-il très important de faire le bon choix car les fausses dévotions pullulent, et il est assez facile de les prendre pour de vraies. En effet, le diable est un trompeur, et il fait tous ses efforts pour tromper et damner les âmes en les portant à de fausses dévotions.
On comprend donc l’importance de bien connaître les fausses dévotions à la Très Sainte Vierge, afin de les éviter, et d’embrasser les véritables et de nous y attacher.
Le saint dénombre sept fausses dévotions et sept de faux dévots à la Sainte Vierge. Pour cette fois, les 4 premières :
1 – Les dévots critiques sont, pour l’ordinaire, des savants orgueilleux, des esprits forts et suffisants, qui ont au fond quelque dévotion à la Sainte Vierge, mais qui critiquent presque toutes les pratiques de dévotion à la Sainte Vierge que les gens simples rendent simplement et saintement à cette bonne Mère, parce qu’elles ne reviennent pas à leur fantaisie. Ils révoquent en doute tous les miracles et histoires rapportés par des auteurs dignes de foi, ou tirés des chroniques des ordres religieux, qui font foi des miséricordes et de la puissance de la Très Sainte Vierge. Ils ne sauraient voir qu’avec peine des gens simples et humbles à genoux devant un autel ou image de la Sainte Vierge, quelquefois dans le coin d’une rue pour y prier Dieu ; et ils les accusent d’idolâtrie, comme s’ils adoraient le bois ou la pierre ; ils disent que, pour eux, ils n’aiment point ces dévotions extérieures et qu’ils n’ont pas l’esprit si faible que d’ajouter foi à tant de contes et historiettes qu’on débite de la Sainte Vierge, ou ils répondent qu’ils ont parlé en orateurs, par exagération, ou ils donnent une mauvaise explication à leurs paroles.
Ces sortes de faux dévots et de gens orgueilleux et mondains sont beaucoup à craindre et ils font un tort infini à la dévotion à la Très Sainte Vierge, et en éloignent les peuples d’une manière efficace, sous prétexte d’en détruire les abus.
2 – Les dévots scrupuleux sont des gens qui craignent de déshonorer le Fils en honorant la Mère, d’abaisser l’un en élevant l’autre. Ils ne sauraient souffrir qu’on donne à la Sainte Vierge des louanges très justes, que lui ont donné les saints Pères ; ils ne souffrent qu’avec peine qu’il y ait plus de monde à genoux devant un autel de la Sainte Vierge que devant le Saint-Sacrement, comme si l’un était contraire à l’autre ; comme si ceux qui prient la Sainte Vierge ne priaient pas Jésus-Christ par elle ! Ils ne veulent pas qu’on parle si souvent de la Sainte Vierge et qu’on s’adresse si souvent à elle.
Voici quelques sentences qui leur sont ordinaires : A quoi bon tant de chapelets, tant de confréries et de dévotions extérieures à la Sainte Vierge. Il y a en cela bien de l’ignorance. C’est faire une momerie de notre religion. Parlez-moi de ceux qui sont dévots à Jésus-Christ (ils le nomment souvent sans se découvrir, je le dis par parenthèse) : il faut recourir à Jésus-Christ, il est notre médiateur ; il faut prêcher Jésus-Christ, voilà le solide !
Ce qu’ils disent est vrai dans un sens ; mais par rapport à l’application qu’ils ont font, pour empêcher la dévotion à la Très Sainte Vierge, il est très dangereux, et un fin piège du malin, sous prétexte d’un plus grand bien ; car jamais on n’honore plus Jésus-Christ que lorsqu’on honore plus la Très Sainte Vierge, puisqu’on ne l’honore qu’afin d’honorer plus parfaitement Jésus-Christ, puisqu’on ne va à elle que comme à la voie pour trouver le terme ou on va, qui est Jésus.
La Sainte Eglise, avec le Saint-Esprit, bénit la Sainte Vierge la première, et Jésus-Christ le second : Benedicta tu in mulieribus, et benedictus fructus ventis tui, Jésus. Non pas parce que la Sainte Vierge soit plus que Jésus-Christ ou égale à lui : ce serait une hérésie intolérable ; mais c’est que pour bénir plus parfaitement Jésus-Christ, il faut auparavant bénir Marie. Disons donc avec tous les vrais dévots de la Sainte Vierge, contre ces faux dévots scrupuleux : O Marie, vous êtes bénie entre toutes les femmes, et béni est le fruit de votre ventre, Jésus.
3
– Les dévots extérieurs sont des personnes qui font consister toute la dévotion
à la Très Sainte Vierge en des pratiques extérieures ; qui ne goûtent que
l’extérieur de la dévotion à la Très Sainte Vierge, parce qu’ils n’ont point
d’esprit intérieur ; qui diront force chapelet à la hâte, entendront
plusieurs messes sans attention, iront aux processions sans dévotion, se
mettront de toutes ses confréries sans amendement de leur vie, sans violence à
leurs passions et sans imitation des vertus de cette Vierge très sainte. Ils
n’aiment que le sensible de la dévotion, sans en goûter le solide ; s’ils
n’ont pas de sensibilités dans leurs pratiques, ils croient qu’ils ne font plus
rien, ils se détractent, ils quittent tout là, ou ils font tout à bâton rompu.
Le monde est plein de ces sortes de dévots extérieurs, et il n’y a pas de gens plus
critiques des personnes d’oraison qui s’appliquent à l’intérieur comme à
l’essentiel, sans mépriser l’extérieur de modestie qui accompagne toujours la
vraie dévotion.
4 – Les dévots présomptueux sont des pécheurs abandonnés à leurs passions, ou des amateurs du monde, qui, sous le beau nom de chrétien et de dévot à la Sainte Vierge, cachent ou l’orgueil, ou l’avarice, ou l’impureté, ou la colère, ou le jurement, ou la médisance, ou l’injustice, etc. ; qui dorment en paix dans leurs mauvaises habitudes, sans se faire beaucoup de violence pour se corriger, sous prétexte qu’ils sont dévots à la Vierge ; qui se promettent que Dieu leur pardonnera, qu’ils ne mourront pas sans confession, et qu’ils ne seront pas damnés, parce qu’ils disent leur chapelet, parce qu’ils jeûnent le samedi, parce qu’ils sont de la confrérie du Saint Rosaire ou Scapulaire, ou de ses congrégations, parce qu’ils portent le petit habit ou la petite chaîne de la Sainte Vierge.
Quand on leur dit que leur dévotion n’est qu’une illusion du diable et qu’une présomption pernicieuse capable de les perdre, ils ne le veulent pas croire ; ils disent que Dieu est bon et miséricordieux ; qu’il ne nous a pas faits pour nous damner ; qu’il n’y a homme qui ne pèche ; qu’ils ne mourront pas sans confession ; qu’un bon peccavi à la mort suffit ; de plus qu’ls sont dévots à la Sainte Vierge ; qu’ils portent le Scapulaire ; qu’ils disent tous les jours sans reproche et sans vanité sept Pater et sept Ave en son honneur ; qu’ils disent même quelquefois le chapelet et l’Office de la Sainte Vierge ; qu’ils jeûnent, etc. Pour confirmer ce qu’ils disent et s’aveugler davantage, ils apportent quelques histoires qu’ils ont entendues ou lues en des livres, vraies ou fausses, n’importe pas, qui font foi que des personnes mortes en péché mortel, sans confession, parce qu’elles avaient, pendant leur vie, dit pendant leur vie quelques prières ou fait quelques pratiques de dévotion à la Sainte Vierge, ou ont été ressuscitées pour se confesser, ou leur âme à demeuré miraculeusement dans leurs corps jusqu’à la confession, ou par la miséricorde de la Sainte Vierge, ont obtenu de Dieu, à leur mort, la contrition et le pardon de leurs péchés, et par là ont été sauvées, et ainsi qu’ils espèrent la même chose.
Rien n’est si damnable, dans le christianisme, que cette présomption diabolique ; car peut-on dire avec vérité qu’on aime et qu’on honore la Sainte Vierge, lorsque, par ses péchés, on pique, on perce, on crucifie et on outrage impitoyablement Jésus-Christ son Fils ? Si Marie se faisait une loi de sauver par sa miséricorde ces sortes de gens, elle autoriserait le crime, elle aiderait à crucifier et outrager son Fils ; qui l’oserait jamais penser ?
Je dis qu’abuser ainsi de la dévotion à la Très Sainte Vierge, qui, après la dévotion à Notre-Seigneur au Très-Saint-Sacrement, est la plus sainte et la plus solide, c’est commettre un horrible sacrilège, qui, après le sacrilège de l’indigne communion, est le plus grand et le moins pardonnable.
J’avoue que, pour être vraiment dévot à la Sainte Vierge, il n’est pas absolument nécessaire d’être si saint qu’on évite tout péché, quoiqu’il le fût à souhaiter ; mais il faut du moins (qu’on remarque bien ce que je vais dire) :
Premièrement être dans une sincère résolution d’éviter au moins tout péché mortel, qui outrage la Mère aussi bien que le Fils ;
Secondement se faire violence pour éviter le péché.
Troisièmement, se mettre des confrérie, réciter le chapelet, le saint rosaire ou autres prières, jeûner le samedi, etc.
Cela est merveilleusement utile à la
conversion d’un pécheur, même endurci ; et si mon lecteur est tel, et
quand il aurait un pied dans l’abîme, je le lui conseille, mais à condition qu’il
ne pratiquera ces bonnes oeuvres que dans l’intention d’obtenir de Dieu, par
l’intercession de la Sainte Vierge, la grâce de la contrition et du pardon de
ses péchés, et de vaincre ses mauvaises habitudes, et non pas pour demeurer
paisiblement dans l’état du péché, contre les remords de sa conscience,
l’exemple de Jésus-Christ et des saints, et les maximes du saint Evangile.
(Ange Gabriel et Marie)
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