mercredi 3 août 2022

Quelle attitude en temps de persécution et de privation de sacrements ? - 3


QUELLE ATTITUDE EN TEMPS DE PERSECUTION 

ET DE PRIVATION DE SACREMENTS ? – 3

LE SACREMENT DE PENITENCE SANS MINISTRE DU SEIGNEUR : 

SE CONFESSER A DIEU

 

     Entourés des extrémités qui sont les épreuves des saints, si nous ne pouvons confesser nos péchés aux prêtres, confessons-les à Dieu. Je sens, mes enfants, votre délicatesse et vos scrupules : qu’ils cessent et que votre amour pour la croix augmente. Dites-vous à vous-mêmes et, par votre conduite dites à tous ceux qui vous verront ce que disait saint Paul : « Qui me séparera de la charité de Jésus-Christ ? » (Romains VIII, 35)

     Saint Paul était alors dans votre position et il ne disait pas que la privation de tout ministres du Seigneur, où il pouvait se trouver, pouvait le séparer de l’amour de Jésus-Christ et altérer en lui la charité : il savait que, dépouillé de tout secours humain et privé de tout intermédiaire entre lui et le ciel, il trouverait dans son amour, dans son zèle pour l’Evangile et dans la croix, tous les sacrements et les moyens nécessaires pour y parvenir.

     De ce que je viens de dire, il vous ait aisé de voir une grande vérité, bien propre à nous consoler et à vous donner courage : c’est que votre conduite est une vraie confession devant Dieu et devant les hommes. Si la confession doit précéder l’absolution, ici votre conduite doit précéder les grâces de sainteté et de justice que Dieu nous dispense, et c’est une confession publique et continuelle. La confession est nécessaire, dit saint Augustin, parce qu’elle renferme la condamnation du péché ; ici, nous le condamnons d’une manière publique et si solennelle qu’elle est connue de toute la terre, et cette condamnation, qui est cause que nous ne pouvons approcher d’un prêtre, n’est-elle pas plus méritoire qu’une accusation de péché particulière et faite en secret ? La confession secrète de nos péchés au prêtre nous coûtait peu, et celle que nous faisons aujourd’hui est soutenue par le sacrifice perpétuel de nos biens, de notre liberté et de notre repos, de notre réputation et peut-être même de notre vie !

     La confession que nous faisons au prêtre n’était guère utile qu’à nous, au lieu que celle que nous faisons à présent est utile à nos frères et peut servir à toute l’Eglise. Dieu nous fait, tout indignes que nous sommes, la grâce de vouloir se servir de nous pour montrer que c’est un crime énorme d’offenser la vérité et la justice, et notre voix sera d’autant plus intelligible que nous souffrirons de plus grands maux avec plus de patience.

     Notre exemple dit aux fidèles qu’il y a plus de mal qu’on ne pense à faire ce que l’on exige de nous. Nous ne nous confessons pas d’un péché, mais confessons la vérité, ce qui est la confession la plus noble et la plus nécessaire dans les circonstances présentes. Nous ne confessons pas nos péchés en secret : nous confessons la vérité en public ! Nous sommes persécutés, mais la vérité n’est point captive et nous avons cette consolation, dans l’injustice que nous souffrons, que nous ne retenons pas la vérité de Dieu dans l’injustice, comme dit l’Apôtre des nations, et que nous apprenons à nos  frères à ne l’y point retenir. Enfin, si nous ne confessons point nos péchés, l’Eglise les confesse pour nous.

     Telles sont les règles admirables de la Providence qui permet ces épreuves pour nous faire mériter et nous faire réfléchir sérieusement sur l’usage que nous avons fait des sacrements.

     L’habitude de la facilité que nous avions de nous confesser nous laissait souvent dans la tiédeur, au lieu qu’à présent, privés de confesseurs, on se replie sur soi-même et la ferveur augmente. Regardons cette privation comme un jeûne pour nos âmes et une préparation à recevoir le baptême de la pénitence qui, vivement désiré, deviendra une nourriture plus salutaire. Tâchons d’éloigner de notre conduite qui est notre confession devant les hommes et notre accusation devient Dieu, tous les défauts qui peuvent s’être glissés dans nos confessions ordinaires, surtout le peu d’humilité intérieure.    

     Ce que j’ai dit est plus que suffisant, cependant, je ne sais si j’aurai réussi à vous tranquilliser sur les anxiétés et les scrupules que la délicatesse élève dans une âme réduite à se juger elle-même et à se diriger d’après ses propres mouvements.

     Je sens, mes enfants, toute l’importance de votre sollicitude, mais, quand on se fie à Dieu, il ne faut pas le faire à demi : ce serait manquer de confiance que de regarder les moyens par lesquels Dieu appelle et conserve, incomplets et laissant quelque chose à désirer dans l’ordre de la grâce. Vous trouviez dans la sagesse, la maturité et l’expérience des ministres du Seigneur, des conseils et des pratiques efficaces pour éviter le mal, faire le bien et avancer dans la vertu, tout cela ne tient point au caractère sacramentel, mais aux lumières particulières : un ami vertueux, zélé et charitable peut être en ce point votre juge et votre directeur.  Les personnes pieuses n’allaient pas seulement chercher au tribunal des instructions et des lumières : elles s’ouvraient aux personnes remarquables par leur sainte vie en des entretiens familiers. Faites de même ; mais que la charité la plus directe règne dans ce commerce mutuel de vos âmes et de vos désirs ; Dieu les bénira, et vous trouverez les lumières dont vous avez besoin. Si ce moyen vous était impossible, reposez-vous sur les miséricordes de Dieu : Il ne vous abandonnera pas, son esprit parlera lui-même à vos cœurs par des aspirations saintes qui les enflammeront et les dirigeront vers les objets augustes de vos destinées.

     Vous me trouverez concis sur ce sujet. Vos désirs vont bien au-delà ; mais un peu de patience, le reste de ma lettre répondra entièrement à votre attente ; on ne peut pas tout dire à la fois, surtout dans un sujet aussi délicat et qui exige la plus grande exactitude. Je vais continuer de vous parler comme je me parle à moi-même.

     Eloignés des ressources du sanctuaire et privés de tout exercice du sacerdoce, il ne nous reste de médiateur que Jésus-Christ : c’est à Lui que nous devons recourir pour nos besoins ; c’est devant sa majesté suprême que nous devons déchirer sans ménagement le voile de nos consciences et, dans la recherche du bien et du mal que nous avons fait, Le remercier de ses grâces, nous reconnaître coupables de nos offenses…et prier ensuite qu’il nous pardonne et nous trace les sentiers de sa volonté sainte (ayant dans le cœur le désir sincère de le faire à son ministre quand et sitôt que nous le pourrons).

     Voilà, mes enfants, ce que j’appelle se confesser à Dieu.  Dans une telle confession bien faite, Dieu lui-même vous absoudra ! C’est l’Evangile qui nous l’apprend en nous proposant l’exemple du publicain qui, humilié devant Dieu, s’en retourna justifié puisque la meilleure marque de l’absolution, c’est la justice qui ne peut être liée puisque c’est elle qui délie. Voilà ce que, dans l’isolement total où nous sommes, nous devons faire. L’Ecriture Sainte nous trace, ici, nos devoirs.

     Tout ce qui tient à Dieu est saint : quand nous souffrons pour la vérité, nos souffrances sont celles de Jésus-Christ qui nous honore d’un caractère particulier de ressemblance avec Lui et avec sa croix. Cette grâce est le plus grand bonheur qui puisse arriver à un mortel pendant sa vie.

     C’est ainsi que dans toutes les positions pénibles qui nous privent des sacrements, la croix portée chrétiennement est la source de la rémission de nos fautes ; comme, portée autrefois par Jésus-Christ, elle le fut des fautes de tout le genre humain. Douter de cette vérité, c’est faire injure à notre Sauveur crucifié, c’est ne reconnaître pas assez la vertu et le mérite de la croix !...

     Dites-moi serait-il possible que le bon larron ait reçu le pardon de ses fautes et que le fidèle qui abandonne tout pour son Dieu n’y reçoit pas le pardon des siennes ?

     Des saints Pères observent que le bon larron fut criminel jusqu’à la croix pour montrer aux fidèles ce qu’ils doivent espérer de cette croix lorsqu’ils l’embrassent et y demeurent attachés pour la justice et pour la vérité. Nous sommes ses disciples, Il est notre modèle, souffrons comme lui et nous entrerons dans l’héritage qu’il nous a préparé par la croix.

     Mais pour être sanctifié par la croix, il ne faut pas être à soi-même, il faut être tout à Dieu ; il faut que notre conduite retrace les vertus de Jésus-Christ : il ne suffit pas, dans ces moments, qu’animés de son amour, vous vous reposiez sur son sein comme Saint-Jean ; il faut que vous le serviez avec fermeté et constance sur le calvaire et sur la croix : là, en nous confessons à Dieu, si votre confession è Dieu n’est pas couronnée par l’imposition des mains des prêtres, elle le sera par l’imposition des mains de Jésus-Christ. Voyez ses mains adorables qui paraissent si pesantes à la nature et qui sont si légères à ceux qui l’aiment !...Elles sont étendues sur vous depuis le matin jusqu’au soir pour vous combler de toutes sortes de bénédictions si vous ne les repoussez pas vous-même. Il n’y a point de bénédiction semblable à celle de Jésus-Christ crucifié quand il bénit ses enfants sur la croix.

     Le sacrement de pénitence est pour nous, dans ce moment, le puits de Jacob, dont l’eau est excellente et salutaire, mais le puits est profond ; dénués de tout, nous ne pouvons y puiser et nous désaltérer ; des gardes même en défendent l’entrée…Voilà la peinture de notre position. Regardons la conduite de nos persécuteurs comme une punition de nos péchés ! Il est certain que si nous pouvions approcher de ce puits avec foi, nous y trouverions Jésus-Christ parlant à la Samaritaine. Mais ne perdons pas courage ! descendons jusque dans la vallée de Béthulie, où nous trouverons plusieurs sources qui ne sont pas gardées, où nous pourrons tranquillement étancher notre soif. Que Jésus-Christ habite dans nos cœurs ! Que son Esprit Saint les enflamme, et nous trouverons en nous cette source d’eau vive qui suppléera au puits de Jacob. Jésus-Christ, comme souverain pontife, fait lui-même, d’une manière ineffable, dans la confession que nous faisons à Dieu, ce qu’il aurait fait de tout autre temps par le ministère des prêtres, et cette confession a un avantage que les hommes ne peuvent nous ravir, c’est pourtant en nous Jésus-Christ qui s’occupe de nous continuellement ! Nous devons le faire dans tous les temps, dans les lieux et dans toutes les positions possibles. C’est une chose digne d’admiration de voir que ce que le monde fait pour nous éloigner de Dieu et de son Eglise nous en approche d’avantage.

     La confession ne doit pas être seulement un remède pour tous les péchés passés ; elle doit être un préservatif pour les péchés à venir. Si nous réfléchissons sérieusement sur cette double efficacité du sacrement de pénitence, nous pourrons avoir beaucoup à nous humilier et à gémir ! Et nous y serons d’autant plus fondés que notre avancement dans la vertu aura été plus lent et que nous nous serons toujours trouvés les mêmes, avant et après nos confessions. Nous pouvons actuellement réparer tous ces défauts qui venaient d’une trop grande confiance dans l’absolution et de ce qu’on n’approfondissait pas assez ses plaies !... Obligée maintenant de gémir devant Dieu, l’âme fidèle s’occupe à considérer toutes ses difformités ; là, aux pieds du Sauveur, et pénétrée de la douleur et du repentir, elle y reste dans le silence, ne lui parlant que par des larmes, comme la pécheresse de l’Evangile voyant, d’un côté ses misères et de l’autre, la bonté de Dieu. Elle s’anéantit devant sa majesté, jusqu’à ce qu’elle dissipe ses maux par un de ses regards. C’est là que la lumière divine éclaire son cœur contrit et humilié et lui découvre jusqu’aux atomes qui peuvent l’obscurcir. Que cette confession à Dieu soit pour vous une pratique journalière, courte mais vive, et que de temps en temps vous la fassiez depuis une époque jusqu’à l’autre, comme chaque jour vous la faites de la journée (à votre examen du soir).

     Le premier fruit que vous en retirerez, outre la rémission de vos péchés, ce sera d’apprendre à vous connaître et à connaître Dieu.

     Le deuxième, d’être toujours présentés aux prêtres si vous le pouviez, ornés du caractère des miséricordes du Seigneur.

     Je crois avoir dit, mes enfants, ce que je devais pour votre conduite à l’égard du sacrement de pénitence. Je vais vous entretenir, maintenant, de la privation de l’Eucharistie et, successivement, de tous les objets dont vous me parlez dans votre lettre.

A suivre…« L’Eucharistie et l’extrême-Onction sans ministre du Seigneur »…Si Dieu veut) 

NOTA BENE :

- La lettre ne comportant que le titre CONSOLATIONS, c’est moi qui mets les sous-titres lors de chaque partie publiée.

 

René Pellegrini

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